Le Keelbeek, première ZAD de Belgique

Que signifie le mot ZAD ? C’est l’acronyme de « Zone A Défendre », qui à l’origine était « Zone d’aménagement différé ».


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La ZAD du Keelbeek trouve son commencement un 14 avril 2014, lorsque 400 à 500 militants ont investi cette zone de nature menacée par la construction de la mégaprison de Bruxelles-Haren.

Fourches, bêches et pelles en main, des activistes et citoyens de tous bords débarquent sur le terrain. Ils en labourent une partie et y plantent des patates. C’est pour cela qu’on les appelle « les Patatistes », allusion savoureuse à l’Armée révolutionnaire zapatiste.

JPEGLe site et la lutte contre la mégaprison attirent également des événements culturels.
En août 2014, le festival « PleinOPENair » du Nova Cinema débarque à Haren.
Ce festival de 3 jours draine beaucoup de monde. Les premiers campeurs s’installent sur le Keelbeek.

Dès lors, une vie social voit le jour et des personnes de tous âges et tous milieux commencent à s’y retrouver. Une dynamique de construction de cabanes se met également en marche. A l’aide de palettes et de matériaux de récupération, une cuisine collective et une remise à outils prennent forme. Par la suite, une tente berbère et une yourte donnent une allure de petit village sympathique au camp.

Keelbeek, lieu de vie et symbole de luttes citoyennes

JPEGLe Keelbeek est un lieu de vie, mais il devient vite le symbole des luttes citoyennes et des mobilisations contre les projets néfastes et toxiques, ces projets qui ne profitent qu’à une poignée d’investisseurs et qui desservent le reste de la société.

Le Keelbeek est donc un terrain où les consciences citoyennes s’éveillent et où des vocations contestataires naissent.
Les énergies se fédèrent et un 14 décembre 2014 à l’occasion d’une fête, les occupants du Keelbeek déclarent que toute la zone destiné à la accueillir la mégaprison de Bruxelles-Haren est à présent une ZAD (Zone à Défendre) et se lancent dans une désobéissance civile visible et assumée.

En plus des cultures maraîchères, ce bel espace de nature qu’est le Keelbeek évolue en petite « ferme ouverte ». Il y a des poules, puis en février 2015, des chèvres et un bouc viennent tenir compagnie aux habitants du campement.

JPEGEn avril 2015, a lieu un festival qui rencontrera un large succès. Près de 2000 personnes s’y retrouvent durant 3 jours, parmi eux, de nombreux français.

Au delà du symbole, il y a des actions bien concrètes

La présence permanente d’activistes sur la zone de nature menacée par la construction de la mégaprison de Bruxelles-Haren a permis, de façon non violente, d’empêcher à plusieurs reprises le démarrages de phase de travaux ne bénéficiant pas encore des autorisations ad hoc.

JPEGAinsi, en mai 2015, les occupants donnent l’alerte quand des engins de terrassement et de carottage arrivent sur le site. Grâce à l’alerte, des citoyens viennent en renfort et bloquent ainsi le passage des engins de travaux. Embarrassés, les ouvriers font appel à la police, mais celle-ci ne peut que confirmer ce que les activistes dénoncent : les travaux sont illégaux car les autorisations n’ont pas été accordées par les pouvoirs publics concernés. Demi-tour donc pour les engins de génie civil.

Cet exemple montre à quel point la vigilance citoyenne est importante. Sans elle, le consortium CAFASSO et la Régie des bâtiments auraient pratiqué, une fois de plus, la politique du fait accompli pour réaliser leurs travaux.
On le voit ici, la vigilance citoyenne et l’occupation pacifiste sont un moyen de pression pour obliger les entreprises privées et les pouvoirs publics à respecter et à se conformer aux lois.

A l’été 2015, l’Alter Tour marque une étape sur le Keelbeek. Des dizaines de tentes fleurissent au milieu des prairies.

Une expulsion illégale

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Le 21 septembre 2015, a lieu l’expulsion de la Zad du Keelbeek. Élément à noter, celle-ci se produit au moment même où le Tribunal de première instance de Bruxelles déclare que l’ordre d’expulsion est illégal...
Mais qu’importe pour la Régie des bâtiments, qui fidèle à ses pratiques déloyales et habituées aux méthodes mafieuses (il est bon de rappeler que 71 de ses fonctionnaires ont été poursuivis en justice en 2015 pour des faits de corruption) procède à l’expulsion.

JPEGUne cinquantaine de policiers arrive de grand matin pour procéder à l’expulsion des 7 occupants présents, les autres occupants et leurs soutiens étant à l’audience du tribunal.

Sous l’œil de l’huissière, l’ensemble des cabanes, des constructions est des infrastructures des résistants de la ZAD est passé au bulldozer, puis, le tout est incendié. Plus de trace de la ZAD, même le potager est retourné à la pelleteuse.

Deux activistes restent cependant retranchés pacifiquement dans une cabane en haut des arbres. L’ordre est donné aux ouvriers de détruire la cabane à l’aide d’engins mécaniques. Une vidéo montre les deux jeunes activistes à l’intérieur de la cabane, secoués à plus de 10 mètres de hauteur par la pelleteuse. Un cordon de police empêche toute aide et tout dialogue avec les ouvriers aux ordres de l’huissière. Il n’y a heureusement pas de chute, mais cet exemple illustre une fois encore le genre de violences exercées sur les citoyens contestataires.

A l’heure de la réorganisation

Privés de leurs infrastructures et de leurs logements, les occupants s’installent, avec l’autorisation du propriétaire, sur un terrain mitoyen.

Très vite, la Régie des bâtiments fait grillager l’ensemble du périmètre des 18 hectares repris aux zadistes. Le chemin du Keelbeek, pour lequel l’autorisation de détournement n’a pas été accordée par la Ville de Bruxelles reste toujours accessible aux promeneurs.

JPEGQuatre vigiles sont également dépêchés sur place pour « garder » le terrain 24h sur 24 et 7 jours sur 7. Leur mission est de surveiller les kilomètres de grilles que la Régie de bâtiments vient de faire installer.

Quelle débauche de moyens ! Mais si les vigiles jouent les gros bras sur le Keelbeek avec leurs chiens, ils n’en restent pas moins largement impuissants face à des éléments déterminés... Pour preuve, en une nuit, l’intégralité des grilles bordant le chemin du Keelbeek est découpée, sans même que l’équipe des vigiles de nuit ne s’en aperçoive ! C’était une froide nuit de 24 décembre 2015, les quatre vigiles étaient certainement en train de festoyer dans leur petit bungalow bien au chaud...

En janvier 2016, le terrain est accessible, puisque de nombreuses grillées sont découpées. Les promeneurs et leurs toutous peuvent à nouveau se balader sur le Keelbeek.

La réoccupation des lieux

JPEGL’occupation du Keelbeek reprend le 3 septembre 2016. Et c’est de plein droit que les occupants reviennent sur le Keelbeek, l’expulsion de septembre 2015 ayant été invalidée par le Tribunal de première instance de Bruxelles.

Donc, une poignée d’occupants réinvesti les lieux et y campe. Vigiles et policiers ne peuvent rien faire pour la raison que les occupants ont un jugement en leur faveur.

Toutefois, les allées et venues des campeurs sont gênées par le fait que les vigiles refusent de laisser certaines grilles ouvertes. Qu’importe, une passerelle est mise en place et permet d’enjamber les grilles sans les abîmer.

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La mission des vigiles devient dès lors de plus en plus vaine. Beaucoup de personnes circulent sur le terrain. Les vigiles tentent de les impressionner, parfois appellent la police, mais forts d’une décision de justice en leur faveur, les occupants du Keelbeek continuent la résistance sans s’inquiéter.

En octobre 2016, des zadistes construisent une cabane collective. Elle est composée d’un salon, d’une cuisine et d’un étage. Il y a aussi une petite bergerie attenante.

Chèvres, moutons et cochons se promènent dans les 10 hectares de la partie sud du Keelbeek.

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Allez leur rendre visite :-)