"L’Appel du Keelbeek" a 7 ans, et toutes ses dents !

Il y a 7 ans jour pour jour, les opposants à la mégaprison lançaient "l’appel du Keelbeek".

Cela valait bien un petit anniversaire. Le 4 octobre 2014, cela faisait déjà plus de 2 ans que la mobilisation était engagée. Le 17 avril 2014, journée mondiale des luttes paysannes, plus de 400 personne s’étaient réunies pour planter des patates sur le Keelbeek. La mobilisation avait pris un nouveau tour et à l’été 2014, la première ZAD belge était lancée sur le Keelbeek. L’appel avait été envoyé ensuite.

Depuis, la mobilisation ne s’est pas arrêtée.


La mégaprison non plus, dont la construction se poursuit, genèse d’une crime dont les responsables devront rendre des comptes.

La mégaprison se construisant, "l’appel du Keelbeek" n’aurait-il pas été entendu ? La bêtise et le pouvoir d’état, plus forts que nous, conduisant ce sinistre village carcéral, on pourrait être tenté de baisser les bras. Se disant que cela ne sert à rien. Ou que maintenant il est trop tard. Que c’est le pot de terre contre le pot de fer. Mais on peut aussi se dire l’inverse : que cet appel a été entendu, que les forces productivistes sont pour l’instant trop fortes et qu’il est nécessaire de continuer à se mobiliser et à agir pour d’une part résister à ce qui nous détruit, et d’autre part construire ce qui nous grandit.

Et l’appel du Keelbeek a bien été entendu.

Nous avons été des milliers de personnes actives dans la mobilisation CONTRE la mégaprison et POUR un monde plus juste, plus solidaire, qui s’accorde avec le vivant et notre humanité plutôt qu’il les combat. Les associations nombreuses qui ont activement bataillé contre le cauchemar de la mégaprison comptent des dizaines de milliers de membres. Des liens innombrables ont été créés entre personnes et groupes pour informer sur ce qui se tramait au Keelbeek et mobiliser des énergies.
Et la lutte a payé : le chantier a été repoussé de plus de 5 ans. L’attention a été attirée sur ce projet toxique, le problème de l’enfermement de masse, et les PPP carcéraux. Une nouvelle manière d’envisager la protection de la nature à Bruxelles a commencé à émerger. Des centaines de personnes qui défendaient des valeurs justes ont vécu dans leur chair ce que signifie se confronter au pouvoir de l’état mis au service de l’argent-roi. Ces personnes en ont acquis une conscience politique nouvelle.

De la lutte du Keelbeek sont nées plusieurs autres mobilisations et groupes, autonomes et indépendantes, dont plusieurs pérennes. Pensons au Tuiniersforum des jardiniers, à la plateforme "occupons le terrain", à la ZAD d’Arlon, au collectif de luttes anti-carcérales "CLAC", notamment. Nous aussi avons vu et lu de nombreux groupes et collectifs se référer de manière critique à l’attitude des pouvoirs publics détruisant le Keelbeek et construisant la mégaprison, pour envisager différemment leurs propres mobilisations, affiner et affirmer leurs positions. Nous pensons que c’est une très bonne manière de faire, tirer de l’expérience de ce qui a été observé pour renforcer nos positions communes. Le Keelbeek est en effet un révélateur politique puissant, qui donne des indications précieuses sur le (dys)fonctionnement de l’état dans ses différentes composantes pour concrétiser un grand projet inutile et imposé.

Et la bataille continue.

Nous allons faire la clarté sur le financement de cette mégaprison et la nature réelle du contrat PPP.
Nous allons révéler d’autres mécanismes utilisés par les partis politiques pour construire ce projet toxique.
Nous allons faire savoir ce qui se passe dans une prison aussi démesurée et l’impact que cela a sur les détenus, sur le personnel pénitentiaire, et sur le fonctionnement de la justice.
Nous allons mesurer les incidences environnementales toxiques de cette mégaprison sur le voisinage et sur les personnes qui s’y trouvent enfermées.

En nous appuyant sur déjà 10 ans de mobilisation, nous allons continuer de montrer pourquoi il faut sortir du désastre carcéral, pourquoi il faut arrêter les PPP carcéraux, pourquoi il faut arrêter de détruire la nature, à Bruxelles comme ailleurs, et nous allons continuer d’ouvrir la porte qu’ils veulent absolument maintenir close.

La porte est déjà entrouverte, ouvrons-là vraiment.
Et ça ne va pas être triste.

Vive le Keelbeek libre !

Appel du Keelbeek

Nous, habitant-e-s et ami-e-s du Keelbeek, appelons à l’aide et au soutien !
Le Keelbeek, terrain de 18 ha de nature préservée à Haren (Bruxelles), est menacé à très court terme par le projet de construction d’une mégaprison de 1.200 détenu-e-s. La procédure de construction de cette mégaprison, la plus grande de Belgique, avance très rapidement.

La demande de classement du Keelbeek, introduite par des habitant-e-s et organisations de protection de la nature, a été rejetée par le Gouvernement Régional le 2 octobre 2014.
Il est prévu que les travaux commencent au printemps 2015 et que la prison soit ouverte en 2017.

La prison devrait être construite par le groupe d’entreprises Cafasso, sous la direction de la Régie des bâtiments, pour le compte du Service Public Fédéral Justice. En dehors des constructeurs et des politiques, cette mégaprison ne convient à personne et est dénoncée comme une mauvaise solution par les travailleurs et experts du monde carcéral : elle aggrave les problèmes et n’en résout aucun.

Construire une nouvelle prison, bétonner des terres potentiellement nourricières : ce sont des choix de société qui exigent des débats. Ces débats sont redoutés et fuis par les commanditaires de cette mégaprison qui sont poussés par des intérêts financiers. Ils veulent accélérer sa construction et faire passer en force cette décision d’un autre temps.
Osons ouvrir ces nécessaires débats publics et parlementaires sur la politique carcérale, sur la gestion des finances publiques, sur le futur de l’agriculture et la souveraineté alimentaire de Bruxelles, sur les dénis de démocratie.

Nous,

  • habitant-e-s de Belgique, jugeant inacceptable le durcissement d’un système carcéral basé sur la répression et l’exclusion, motivé par le profit et entretenant l’illusion de la sécurité,
  • habitant-e-s de Belgique, condamnant les partenariats publics-privés qui assèchent les budgets publics au détriment des citoyens, et indignés par la corruption,
  • habitant-e-s de Bruxelles, soucieux-ses de la biodiversité de notre région et de son caractère vivable, inquiet-e-s de la fragilité de notre système alimentaire industriel face à l’accumulation des crises dans un futur proche,
  • habitant-e-s du village de Haren, attaché-e-s à cet unique espace vital de nature au milieu d’une accumulation démesurée d’infrastructures,
  • habitant-e-s et ami-e-s du Keelbeek installé-e-s sur ce terrain depuis août 2014,
    suite à la grande plantation collective de pommes de terre biologiques du 17 avril 2014, journée internationale des luttes paysannes,
  • aux côtés des animaux et plantes qui vivent sur cette terre du Keelbeek,
    ensemble, nous faisons appel aux habitant-e-s de ce pays, aux forces vives qui ne veulent pas participer à la guerre de tous contre tous et contre le vivant.

Nous vous appelons à nous rejoindre, à nous retrouver sur ce terrain, à agir ensemble contre sa destruction évitable et pour continuer à créer et à entretenir les conditions propices à la vie, sur ces terres et ailleurs.

Non au bétonnage des terres, quelles qu’elles soient !

Non à la construction de nouvelles prisons !

Le modèle dominant s’effondre sous nos yeux. N’attendons plus.
Associons nos créativités pour créer un futur enviable pour toutes et tous. Rassemblons-nous !
Nous sommes en colère, d’une rage qui se nourrit de la tristesse viscérale face à la destruction et l’enfermement du vivant.
Nous ne nous sentons pas impuissant-e-s, nous soutenons la vie et sommes soutenus par elle.
Nous ne sommes pas seul-e-s et nous ne laisserons pas faire.

Nous appelons toutes et tous à venir à Haren découvrir le terrain du Keelbeek, profiter de cette nature, la faire connaître et participer aux nombreuses activités qui s’y déroulent. A occuper le terrain, l’habiter, y vivre, cultiver la terre et la protéger. Faisons foisonner la vie sur ces terres, de quelque manière que ce soit !

L’union fait la force. Vive le Keelbeek libre !

Signé : habitant-e-s et ami-e-s du Keelbeek
à Haren, le 4 octobre 2014

PDF - 2 Mo
Appel du Keelbeek - 4 octobre 2014